Psychopathologie de l'enfant

Marika Bergès Bounes : Les difficultés scolaires ( extraits du séminaire)

Logo cycle psychopathologie de l'enfantNous nous revoyons aujourd’hui pour parler de l’enfant et des apprentissages scolaires.
Madame BOUNES expose deux cas cliniques montrant comment des enfants refusent les apprentissages de l’école, ces enfants exprimant clairement leur souffrance d’être séparés de leur mère et de la maison.
A contrario, Philippe Sollers, dans Mémoire, un vrai roman : « on est à la campagne, c’est l’été j’ai cinq ans. Ma mère est à côté de moi et me demande de déchiffrer et d’articuler une ligne du livre pour enfant. Le b.a.ba quoi. Il y a les lettres, les consonnes, les voyelles, la bouche, la respiration, la langue, les dents, la voix. » (Vous notez, hein, toute la sphère orale) « Comment ça s’enchaîne, voilà le problème. Et puis ça se produit ; c’est le déclic; ça s’ouvre, ça se déroule. Je passe comme si je traversais un fleuve à pieds, me voici de l’autre côté du mur du son, sur la rive opposée, à l’air libre. Et j’entends ma mère dire ces mots magiques « Eh bien, tu sais lire ! » là je me lève, je cours ou plutôt je vole. Je cours comme un fou. J’entre dans la forêt, n’arrêtant pas de me répéter « je sais lire, je sais lire ». Ivresse totale ; je sais lire, autrement dit : Sésame ouvre toi. Et la caverne aux trésors s’ouvre je viens de m’emparer de l’arme absolue. »

Marika Bergès Bounes : Psychanalyse de l'enfant

La question c’est : est-ce que la psychanalyse de l’enfant a des spécificités ou bien est-ce qu’elle se traite comme la psychanalyse de l’adulte. Toutes les écoles analytiques n’ont pas la même position là-dessus. Pour certaines écoles analytiques la psychanalyse de l’enfant, c’est une sous psychanalyse. C’est un peu moins bien. Oui, c’est un peu moins bien inutile de vous dire que je ne suis pas d’accord. Je vous dirai pourquoi je ne suis pas d’accord parce que je trouve que la psychanalyse d’enfants c’est extrêmement délicat, compliqué, l’enfant est tout le temps en mouvement, est en développement, et donc je trouve que c’est encore plus compliqué qu’une psychanalyse d’adulte. Et je trouve aussi que les psychanalystes d’adultes devraient tous à un moment donné aller faire un peu de psychanalyse avec des enfants. D’abord ça leur permettrait de comprendre qu’est ce qu’un enfant et deuxièmement ça leur permettrait de se mettre en prise directe avec la névrose infantile, celle qui nous mène tous, celle dont Freud nous a parlé. Voilà.

Eva-Marie Golder : Introduction à la clinique infantile (extrait)

Je vais essayer de suivre une certaine ligne, une ligne qui montre comment les choses se frayent. De suivre à la fois le fil des frayages pour illustrer comment ces inscriptions se font chez l’enfant et puis en même temps, je voudrais peu à peu vous rendre attentifs à la démarche de l’approche clinique. À savoir que nous avons à apprendre à laisser parler ce qui peut se lire et à renoncer à interpréter. C’est le grand problème, notamment des praticiens de l’enfance qui aiment beaucoup écrire des romans, mais qui sont souvent des romans de névrosés. C’est à dire qu’ils racontent l’histoire du praticien et pas tant l’histoire d’un enfant qui donne un certain nombre de signes qui font appel…

M. Berges-Bounes : Les difficultés d'apprentissage

Philippe Sollers, dans Un vrai roman. Mémoires : « On est à la campagne, c’est l’été, j’ai cinq ans. Je suis assis sur un tapis rouge sombre, ma mère est à côté de moi et me demande une fois de plus de déchiffrer et d’articuler une ligne du livre pour enfants. Le b.a.-ba, quoi. L’annonage. Il y a des lettres, des consonnes, des voyelles. La bouche, la respiration, la langue, les dents, la voix ». Vous voyez comment le corps est pris tout de suite dans cet acte de lire. « Comment ça s’enchaine, voilà le problème. Et puis, ça se produit, c’est le déclic, ça s’ouvre, ça se déroule. Je passe comme si je traversais un fleuve à pieds secs. Me voici de l’autre côté du mur du son, sur la rive opposée, à l’air libre. J’entends ma mère dire ces mots magiques : « eh bien, tu sais lire ! » Là, je me lève, ou plutôt, je cours, je vole dans l’escalier. Je sors, je cours comme un fou. J’entre dans la forêt, n’arrêtant pas de me répéter : « je sais lire ! Je sais lire ! » Ivresse totale, partagée, il me semble, par les vignes, les pins, les chênes, les oiseaux furtifs. Je sais lire, autrement dit :« Sésame, ouvre-toi ». Et la caverne aux trésors s’ouvre. Je viens de m’emparer de l’arme absolue. Toutes les autres sont illusoires, mortelles, grotesques, limitées, ridicules. Le temps m’appartient, je suis Dieu lui-même. Naissance, oui, seconde, ou plutôt vraie naissance, seul au monde avec cette clé ».

Alors vous entendez bien évidemment la différence entre les deux positions face à la lecture et au savoir d’une manière plus générale.

S.Calmettes-Jean : Cours de Psychopathologie de l'enfant et de l'adolescent - 2

………. C'est vous dire que ces enfants qui ont un très bon niveau de langage, un très bon niveau de connaissances, qui apprennent bien à l'école, ne sont pas inscrits vraiment dans le langage et avec un nombre de malentendus avec les adultes qui les laissent eux tout à fait désarmés, incompris, et on passe à côté de la nature de leurs difficultés. Vous voyez, il y a comme ça quelque chose de leurs compétences, on va dire cognitives, qui fait passer complètement à côté des grandes difficultés psychologiques des enfants. Et c'est pour ça si vous voulez que l'attention vraiment particulière au langage des enfants et pas seulement leurs compétences engagées, la manière dont ils sont inscrits dans le langage, la manière dont ils vont avoir accès à la métaphore ou pas c'est vraiment important.

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