Psychopathologie de l'adolescent

Lola Forgeot : L’éthique en pédopsychiatrie

Pourquoi séparer un enfant de sa mère lorsqu’elle est le seul référent parental qu’il lui reste ? Peut-on imposer à un adolescent une séparation qu’il ne souhaite pas ? Dans la mesure où il ne présente pas de troubles psychiatriques avérés, son consentement peut-il être pris en compte et considéré comme éclairé ? Une question que j’ajouterais, et qui me semble être le cœur d’une réflexion éthique possible en pédopsychiatrie : quelles sont respectivement la place de la protection de l’enfance et la place du soin dans une situation comme celle-ci ? La place de l’enfant et la place des parents dans les décisions qui le concerne ? Quelle est la frontière entre la bienfaisance ou la non malfaisance et le respect de l’autonomie de la personne ? Vous voyez déjà un peu le champ des questions éthiques qui se pose. Cette question est effectivement centrale dans la pratique quotidienne de la pédopsychiatrie et en y réfléchissant, loin de moi l’idée de pouvoir brosser l’ensemble du champ des questions éthiques de la pédopsychiatrie, mais il m’est venu l’idée ce soir de vous parler de trois axes, qui me semblent être trois axes qui se répètent dans la pratique quotidienne.

Jean-Marie Forget : Cycle Psychopathologie de l'enfant et de l'adolescent

Enfant RenoirBonsoir, ce soir on va travailler sur l'adolescence. Je m'appelle Jean-Marie Forget, j’ai une formation de psychiatre, et j'ai travaillé dans le secteur public pendant un certain nombre d'années ; c’est notamment là que, après avoir travaillé dans la psychiatrie adulte et puis la pédopsychiatrie, j'ai eu l'occasion de travailler sur les questions des adolescents. Il y a notamment deux éléments que j'avais trouvés intéressants : la manière dont, quand on rapporte une manifestation de souffrance, ou un symptôme, qui semblent souvent avoir des allures dramatiques, à la logique familiale, on se rend compte qu'on arrive à désamorcer les choses très vite, et ça redistribue les responsabilités de chacun. C’est toujours un travail tout à fait intéressant et assez surprenant.

J-M.Forget : Y a-t-il une clinique spécifique à l’adolescence ?

Pouvons-nous parler d’une clinique des adolescents ?
Alors, en introduction, je voudrais vous proposer trois caractéristiques qui me sembleraient exemplaires d’une clinique de l’adolescence, qui est une clinique symptomatique en train de se constituer.
La première, c’est que ce serait une clinique du désir sexuel en tant qu’il est mis en jeu par le réveil de la puberté, et, que le réel du corps et de la jouissance va imposer au sujet et au jeune d’en rendre compte par des coordonnées intimes de son identité qui sont déjà en place, mais qui jusqu’alors lui ont permis de saisir ou d’appréhender approximativement sa place d’être de parole. Ce sont des marques inconscientes qui viennent s’appuyer sur des marques inconscientes qui lui échappent. Et, ces marques inconscientes, il les découvre. Il les découvre en même temps qu’il va y prendre appui. Comme un enfant apprend à tenir compte de son déséquilibre quand il commence à marcher, quand il se lance. Je trouve que la comparaison avec la manière dont un enfant se lance et dont il tient compte de son déséquilibre me semble toujours très parlante. Bon, c’est un des premiers points.