Edito de Charles Melman : Le populisme en médecine

La prévalence  accordée au savoir spontané et intuitif, non raisonné, non scientifique ne gagne plus seulement la vie sociale. Elle est directement encouragée par le Ministère de la Santé pour que des associations d’usagers deviennent les interlocuteurs obligés des médecins. Leur interventionnisme s’est ainsi récemment illustré dans des débats sur l’autisme infantile afin de développer les méthodes rééducatives au détriment, voire avec l’interdiction,  des approches psychanalytiques. Chacun peut se réjouir de la mise en place d’institutions vouées à s’occuper la journée durant de ces enfants.

Mais la dénonciation,  sinon la mise à l’écart, du savoir psychanalytique pour des parents douloureux d’être, à cause d’elle, concernés par la survenue de la maladie, pose un problème de principe.

L’histoire de la médecine en effet rappelle que un savoir a toujours dû se défendre contre l’opinion, celle de l’Eglise, de la Cité, voire du Parti, voire du bon cœur. Aujourd’hui encore des médecines dites « naturelles » peuvent avoir la faveur contre les seuls  secs résultats de la science.

Les Grecs savaient distinguer la pratique de l’artisan du savoir de l’ingénieur ou de l’architecte, afin de justifier la hiérarchie du commandement.

Dans notre domaine la promotion du biologisme qui avance que le corps dispose des savoirs propres à guider toute la pratique s’inscrit dans le grand courant politique démagogique du populisme. Le projet de démocratisation directe – chacun en saurait assez spontanément pour diriger – non représentative donc, en est un élément. Il réanime des systèmes d’aliénation politique de masse - si le personnel politique n’est plus élu, il est forcément nommé par l’arbitraire du chef - dont il peut paraître étonnant que ne s’émeuvent plus les spécialistes. Serait-ce l’ambiance qui les ferait hésiter ?